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Trois livres contre l’américanisation

Par Paul-Marie Coûteaux et Patrick Pommier

Nous suggérons à nos lecteurs trois ouvrages fondamentaux : Le Mythe du Sauveur américain (1917-1918) de l’historien Dominique Lormier, La France colonisée dû au très regretté Jacques Thibau, et L’ami américain d’Éric Branca.

Dominique Lormier, Le Mythe du Sauveur américain : Essai sur une imposture historique – 1917-1918 (Pierre de Taillac, 2017)

Depuis cent ans, une légende tenace attribue la victoire des Alliés à l’arrivée des renforts américains. Or, les faits démontrent le contraire, imposture que cet essai remarquable dénonce. Loin de remettre en cause le courage des soldats américains, Dominique Lormier replace cet engagement dans le rapport de forces global : la propagande qui a accompagné l’entrée en guerre des Etats-Unis doit cesser d’occulter les principaux acteurs de la Victoire, le poilu français, le tommy britannique, le soldat italien… A chaque anniversaire de 1918, documentaires télévisés et radiophoniques, articles et livres alimentent la propagande. Les images filmées présentent ad nauseam l’arrivée massive des troupes américaines dans les ports français, leurs entraînements, leurs défilés, leurs combats. Mais on n’aborde jamais le fait que ces mêmes combats n’ont eu qu’une portée extrêmement limitée sur le déroulement du conflit. On souligne, en revanche, l’état d’épuisement de l’armée française, affaiblie par de nombreuses mutineries et prétendument incapable de reprendre l’offensive. Britanniques et Italiens ne sont pas mieux traités, sans oublier la défection russe. Ainsi, l’armée américaine aurait sauvé des Alliés au bord du gouffre, alors que Berlin fut dès mars 1918 en proie à des émeutes telles que le pouvoir vacillait. On se demande bien par quel miracle une armée ne disposant que de très peu d’officiers connaissant la guerre moderne, composée de soldats inexpérimentés, à la traîne en matière d’armement, aurait pu, en quelques mois, se transformer pour triompher d’une des plus puissantes ma[1]chines de guerre de l’histoire ! Rares sont les historiens qui osent remettre en cause cette imposture se fondant sur des faits historiques irréfutables, chiffrés, reposant sur les archives militaires des principaux belligérants, des témoignages méconnus, des études récentes et indépendantes.

Jacques Thibau, La France colonisée (Flammarion, 1980)

Il est significatif, mais regrettable, que n’ait jamais été réédité cet ouvrage capital, qui déjà posait de manière crue la grande question de notre dossier : L’américanisation est-elle le destin de la France ? Fruit d’un long travail de re[1]cherche dû à l’ambassadeur de France Jacques Thibau, pour la première fois, était exposé l’ensemble des domaines politiques et économiques, mais aussi culturels, éducatifs et même psychologiques et moraux de l’influence diffuse qu’exerçait déjà l’omniprésent et divin « oncle Sam ». Thibau décrit par le menu les étapes qui, dès 1920, ont conduit les Français à se faire, par petites touches (musique, arts plastiques, cinéma, école…) une représentation mythique de l’Amérique, tandis que l’image de la France fut de plus en plus présentée comme dépassée, sur fond d’une ‘Europe nouvelle’, voire d’« Etats-Unis d’Europe » présentés comme l’autre pilier d’une commune civilisation atlantique. Thibau montre combien le Gouvernement états-unien, appuyée sur les Universités, Hollywood, et une myriade d’associations et de fondations (il s’agit d’une politique concertée, plus discrète que la sonore « coopération française », mais plus efficace) parvient à prendre en mains notre imaginaire : reprenant la phrase terrible d’Henri Gobard « De Gaulle se faisait une certaine idée de la France tandis que les Français se faisaient une certaine idée de l’Amérique », il conclut que l’imaginaire national fut tellement dévalué en trois générations que la propriété même de notre pays commença dès les années 70 à échapper à ses fils selon un scénario qui n’est pas celui de la pure et simple colonisation : « A moins qu’il ne parvienne à la rattraper, la France sera bientôt échappée aux Français ».

Eric Branca, L’ami américain (Perrin, 2017)

Ancien directeur de Valeurs Actuelles, Eric Branca, journaliste de grand talent auquel on doit de nombreux ouvrages politiques, s’est mué en historien, plongeant dans les archives les plus diverses (et quelque[1]fois secrètes) pour analyser la façon dont les Etats-Unis tentèrent de profiter du déclassement fran[1]çais de 1940 pour prendre en mains son personnel politique – hélas avec bien des succès, à commencer par l’entourage du Maréchal Pétain, puis, peu à peu, à la Libération et à la faveur de la guerre froide, toute la gauche non communiste, ainsi qu’une partie de la droite. Las, Roosevelt et ses successeurs tombèrent sur un os : de Gaulle. Branca relate leur incroyable hargne contre celui qui entendait non seulement restaurer l’in[1]dépendance de son pays mais en montrer l’exemple pour toute l’Europe, voire pour le monde entier ; il y eut certes une petite accalmie de surface sous Kennedy et l’auteur suggère que les « relations entre les services et leurs périphéries » ont impliqué la CIA dans plusieurs tentatives d’assassinat, sous couvert de la très atlantiste OAS, et surtout, sous Nixon, dont bénéficia Pompidou. Mais l’appareil de l’OTAN ne s’en fit pas moins implacable pour placer notre pays sous influence en lui menant « une guerre secrète : l’hyper[1]puissance contre le Connétable », sous-titre de l’édition de poche récemment parue dont le succès prouve que l’ouvrage fait déjà référence…

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