Soins palliatifs, la vraie alternative à l’euthanasie, par Jean-Frédéric Poisson (éditions Mame, février 2023)
C’est un ouvrage très précieux que vient de publier Jean-Frédéric Poisson : précieux pour notre édification personnelle face à l’un des sujets les plus graves de nos vies (Comment mourir ? Avons-nous encore le choix d’une bonne mort ? etc.). Ouvrage précieux aussi pour le combat que les Conservateurs, héritiers d’une civilisation deux fois millénaire qui fait de la défense de la vie sa clef de voûte, doivent une fois de plus mener contre une nouvelle avancée de la culture de mort, la « libéralisation » de l’euthanasie pour laquelle M. Macron et son Gouvernement préparent un projet de loi. Contre elle, nous pouvons et devons gagner pour sauver le coeur même de notre monde : la protection de la vie. Comme l’écrit ici l’abbé Guillaume de Tanoüarn, le livre de Jean-Frédéric Poisson dépasse de beaucoup la question de l’euthanasie : en philosophe, notre auteur pointe l’espèce de guerre que, volens nolens, la technique et les techniciens (notamment médicaux…) déclarent implicitement à l’humanité même de l’homme en mettant de côté son cristal essentiel, l’intrinsèque faiblesse, la maladie incurable, la finitude. C’est au point que les temps modernes atteignent, observe-t-il, un paradoxe insupportable : on n’a jamais si bien soigné et jamais si mal accompagné les incurables et les mourants.
Paradoxe qui n’est point illogique : pour les maîtres du monde, absorbés dans une rhétorique de la performance qui, poussée à ses limites chez les transhumanistes, en vient à prétendre créer par petites touches un « homme nouveau » (en tous les cas un homme tout autre), toute faiblesse est une anomalie, elle est impensable : il faut l’éliminer. Pour le système technicien et plus largement l’idéologie du progrès, la misère de l’homme est une insoluble contradiction, une aporie insupportable en ce qu’elle prouve que le merveilleux horizon que les techno-progressistes croient infini est en réalité, de tous temps, fini, borné, brutalement impossible. Le premier caractère de toute vie, c’est la faiblesse.
La médecine est capable de prolonger indéfiniment des vies qui n’en sont plus. La définition même de la mort est devenue incertaine. L’une de ces opinions suffit-elle à bouleverser l’ordre juridique et moral de notre société en brisant l’interdit de tuer ?
JFP
Nous avons déjà abordé ce thème, majeur dans la pensée conservatrice, dans le dossier du Nouveau Conservateur n°3 – Les délires de la Modernité. Revenons sur cet immense sujet tandis qu’un factice débat a été fabriqué par une « Convention Citoyenne » mise en place par le Gouvernement avant de saisir prochainement le Parlement d’un projet de loi sur la légalisation de l’euthanasie. Quant à nous, nous entendons nous aussi « ouvrir le débat » en présentant le dossier tel qu’il doit l’être : si ce monde a tant de difficulté avec la faiblesse humaine, si il veut en quelque sorte se débarrasser de la question de la souffrance, de la faiblesse et du grand âge, c’est bien parce qu’il est en difficulté avec la mort, et par conséquent, avec la vie même – prouvant ici qu’il est de bout en bout (de la naissance, déjà problématique de plusieurs façons, jusqu’à la procréation et la mort) dans l’erreur et même le contresens anthropologique.
Ce débat, nous l’ouvrons avec l’ouvrage de Jean-Frédéric Poisson qui sert de fil rouge à ce dossier : après le compte-rendu incisif qu’en fait Guillaume de Tanoüarn, on trouvera un entretien avec l’auteur, ainsi que de très substantiels extraits de son livre aux multiples horizons; l’ensemble est complété par une réflexion de Virginie Tellenne sur la vigilance dans laquelle la succession de lois bioéthiques, manipulations biologiques (notamment à l’occasion de l’Opération Covid), et de percées transhumanistes, nous impose désormais de vivre pour simplement « rester humains ». Pour conclure, Marion Maréchal dresse une parfaite synthèse des enjeux de la prochaine loi, synthèse qui sera pour nous tous le viatique de ce qui s’annonce comme un très long combat.
