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Non, Macron n’est pas fou ! (1ère partie)

Par François Martin

On prend Emmanuel Macron pour un fou, un incompétent ou un irresponsable. Au contraire, il a une idée très claire de ce qu’il veut obtenir.

Emmanuel Macron, coutumier des manipulations de l’opinion

Le Président français s’est rendu célèbre dans le monde entier par sa faculté de « macroniser » (1). Il s’est montré largement incapable de mener à terme des politiques transformatrices. La plupart du temps, ses paroles n’ont pas eu de suite. Pour autant, sa faculté de manipulation a toujours été très forte. Il l’a montré à de nombreuses reprises, comme par exemple :

  • après la mort de Samuel Paty, où le gouvernement a monté peu de temps après, et de toutes pièces, « l’affaire Zecler », le 21 Novembre 2020, pour y mettre en accusation sa propre police et faire repartir vers la gauche son opinion scandalisée par la décapitation effroyable du professeur (2)
  • au moment de la mort de Stéphanie Monfermé, assassinée à Rambouillet le 23 Avril 2021, lorsque le gouvernement a opportunément « sorti », quelques jours après, une condamnation contre « l’appel des généraux », un texte qui était passé, jusque là, totalement inaperçu (3)
  • au moment du Covid, lorsque Macron a initié une « chasse aux sorcières » contre les non-vaccinés, pour éviter de faire mettre en accusation sa politique liberticide

Chaque fois, le Président a fait une déclaration très brutale, ou mis en œuvre une action spécifique, destinées à « retourner » l’opinion. C’est la même chose qu’il fait aujourd’hui.

Macron a perdu la face

En effet, depuis la nomination de Gabriel Attal, et même depuis sa seconde élection, Emmanuel Macron « patine ». Il semble avoir comme « perdu la main ». Le pire a été obtenu lors de sa visite récente au Salon de l’Agriculture, où il a dû fuir vers sa voiture après avoir été protégé par plus de 1000 policiers, dans une effroyable pagaille, alors que Jordan Bardella, le lendemain, a été accueilli presque comme un héros… A cette occasion, il a véritablement perdu la face. Il était indispensable pour lui de faire une déclaration-choc pour pouvoir garder la main. C’est ce qu’il a fait. Sur ce plan donc, son intervention ne procède pas d’une maladresse, mais d’un choix délibéré, et momentanément réussi, puisqu’ensuite, on n’a parlé que de cela et plus du tout des agriculteurs. Il leur a ainsi « volé la  vedette » et attiré à nouveau l’attention médiatique sur lui, ce qui était l’objectif recherché.

La guerre d’Ukraine est déjà finie

Mais sur le fond, Macron devait-il parler de la guerre d’Ukraine, et « rallumer les mèches » de la dynamite anti-russe, au point de se faire « rabrouer » par presque tous les chefs d’Etats de la planète, y compris par ses alliés européens ?

Pour comprendre son action, il faut se replacer dans le contexte, Or celui-ci a profondément changé, sans qu’on s’en soit véritablement aperçu. Aujourd’hui, pour tous les spécialistes, et même si la « grande presse » aux ordres continue à  faire croire le contraire, la guerre est perdue pour l’Ukraine. Même si le gouvernement démocrate américain parvient à libérer l’aide actuellement bloquée par les républicains au Congrès (4), même si les européens parviennement à s’y substituer pour partie (5), cela ne servira qu’à remuer un cadavre déjà mort, celui de l’armée ukrainienne, et non à le ressusciter. Un chiffre suffit à le montrer : la moyenne d’âge de l’armée ukrainienne est aujourd’hui de 45 ans. Même avec tous les crédits, toutes les armes, toutes les formations et même tous les supplétifs étrangers du monde, l’affaire n’est pas gagnable. Il faudrait repartir de zéro, avec une nouvelle mobilisation (à supposer que cela soit possible), et refabriquer de toutes pièces une armée, comme cela avait été fait entre 2014 et 2022. Et cela sous le feu des russes ? Impossible. Les généraux le savent si bien que Zaloujny, l’ancien CEMA, a récemment quitté son poste, et que les soldats désertent en masse. Même si les médias et les politiques continuent à mentir, personne ne peut plus croire à cette fable. Si c’est le cas, pourquoi continue-t-on donc à « faire semblant » ?

La question d’aujourd’hui : quel est l’avenir de l’OTAN ?

C’est qu’une autre partie se joue aujourd’hui, autrement plus importante même que la guerre d’Ukraine : celle de l’avenir de l’OTAN.

Parmi les scénarios de sortie de crise, il est clair déjà que deux sont exclus : celui de la guerre nucléaire et celui de la paix. Le premier parce qu’il signifie l’échec et la catastrophe finale pour tous, le deuxième parce qu’il constituerait l’abandon définitif par les USA de leur politique d’avancée vers l’est, incluant, après la chute du premier rideau de fer en 1989, la création d’un deuxième, de telle sorte que leur pire cauchemar, celui d’une alliance entre la Russie et l’Europe, ne se réalise jamais. Tous les efforts déployés depuis 1991 pour « corneriser » la Russie seraient alors réduits à néant.

Ne reste alors qu’une seule option, la non-belligérance, elle-même pouvant être déclinée en deux variantes, la « douce » et la « dure ».   

La douce, ce serait un « arrangement » à la coréenne, sans traité de paix véritable, pour ne  simplement pas s’agresser mutuellement. Le problème que pose cette solution est qu’elle ne répond pas à la grande question qui va se poser dès que la défaite de l’Ukraine sera définitive (6), et qui, de fait, se pose déjà : quel est l’avenir de l’OTAN ?

Pour justifier l’OTAN, terroriser l’Europe

A cette question, qui est la plus centrale des questions géopolitiques actuelles, puisqu’elle détermine non pas la défense de l’Europe, mais bien la domination de celle-ci par les USA, et donc leur hégémonie future (7), deux réponses sont possibles à la fin de la guerre d’Ukraine : une première est de constater : « Nous n’avons plus besoin de l’OTAN. Elle est inutile, puisqu’elle a perdu la guerre contre la Russie ». La deuxième est inverse. C’est celle qui consiste à dire : « Jamais nous n’avons eu autant besoin de l’OTAN, puisque les russes sont à nos portes ». La première vise à calmer la non-belligérance, la deuxième à l’hystériser. La première est très dangereuse pour les USA, puisqu’elle pourrait ouvrir la porte à une prise d’indépendance de l’Europe, ce qu’elle n’a jamais osé faire depuis l’échec du traité de l’Elysée, de Janvier 1963, avorté par les américains par l’entremise de Jean Monnet (8). La deuxième est parfaite. C’est évidemment celle-là, celle de la non-belligerance « dure », qui est choisie par les USA aujourd’hui, puisqu’elle maintient au mieux leurs intérêts politiques et commerciaux.

Elle a déjà été mise en œuvre, à travers la surenchère médiatique orchestrée par les officines de propagande américaines, et dont on peut prévoir qu’elle devrait durer des années, sinon des dizaines d’années. Il s’agit en effet de s’assurer que les opinions européennes restent durablement terrorisées. Cela facilitera le pillage de l’Europe en cours (9), la ruine des concurrences militaires, principalement françaises, et le « gavage » de l’oie européenne par le complexe militaro-industriel américain. Tout sera ainsi pour le mieux dans le meilleur des mondes (10).

C’est dans ce sens qu’il faut lire aussi les récents « accords bilatéraux de sécurité » passés par le Royaume Uni, l’Allemagne et la France. En attendant que, à Dieu ne plaise, l’Ukraine puisse un jour entrer dans l’Europe et dans l’OTAN, une volonté affichée par nos maîtres atlantistes pour institutionnaliser l’insécurité européenne, il faut déjà instituer une forme d’ « OTAN bilatérale » non officielle. Ainsi, on consolidera, pour chaque pays, le « système de peur » nécessaire au maintien de la domination de l’OTAN sur l’Europe.

C’est dans ce sens qu’il faut lire les récentes tergiversations allemandes visant à décider s’il faut ou non livrer des missiles Taurus à l’Ukraine. L’objectif (inutile!) serait de pouvoir tirer sur le pont de Crimée. Pourquoi ? Parce que l’Europe sait très bien que le fait d’utiliser ces missiles à longue portée sur la Russie directement pourrait constituer un « casus belli », et une réponse par un tir des russes directement sur l’Allemagne (par exemple sur l’usine qui fabrique les Taurus). Par ailleurs, la Crimée ne dépend plus du pont de Crimée, puisqu’elle dispose maintenant de la route le long de la mer d’Azov pour s’approvisionner. Ce pont n’est donc pas stratégique pour la Russie. Un tir sur cet objectif aurait ainsi uniquement un sens « symbolique » puisqu’il permettrait aux ukrainiens d’affirmer qu’ils ont frappé « la Russie » sans véritablement le faire… Minables ambitions ! (11)

Et c’est dans ce sens, celui de la politique d’hystérisation systématique décidée par les américains, qu’il faut comprendre la déclaration d’Emmanuel Macron expliquant que l’envoi de troupes européennes est une option. Elle ne vise pas à attaquer aujourd’hui l’Ukraine, ni encore moins la Russie, mais à confirmer aux opinions françaises « qu’on est en guerre » (tout en disant par ailleurs qu’on n’est pas co-belligérants…). Le but est de s’approcher du « seuil » le plus possible, pour que la tension soit maximale, sans pour autant y aller. Sauf si les américains, un jour, le décident… Avec ses déclarations, Macron s’aligne donc parfaitement sur la politique de ses « maîtres ».

Utiliser les Européens pour combattre les Russes fait partie des plans américains depuis toujours

Outre le fait que cela permettra, pendant la campagne européenne, de jeter un pavé dans la mare du RN, en l’accusant d’être « collabo » et pro-russe (12), il faut remarquer pour finir que l’assertion de Macron est vraie. En effet, le fait d’utiliser les armées européennes pour aller combattre les russes fait partie des stratégies américaines depuis la deuxième guerre mondiale (13) ! Cette stratégie n’est absolument pas une nouveauté, et surtout pas depuis le début de cette guerre d’Ukraine. Il est évident que les chefs d’Etats européens actuels (14) en ont déjà discuté avec leur « maître » américain (15).

Que reproche-t-on donc à Macron ? Non pas de l’avoir dit, mais de l’avoir dit trop tôt, alors que les opinions européennes n’ont pas encore été suffisamment « travaillées » par la propagande d’hystérisantion, et qu’elles ne sont pas prêtes. Sans cette précaution, elles risquent de se révolter. La domination américaine sur l’Europe pourrait alors être contestée, non pas par les gouvernants, mais par les peuples. Poussé par l’urgence de trouver une porte de sortie médiatique à son problème de politique interne, et à son envie de gêner le RN, son principal adversaire dans la campagne européenne, Macron a « vendu la mèche » avant l’heure. C’est cela que lui reprochent, hypocritement, ses collègues, et non pas d’avoir dit quelque chose qui est, compte tenu du contexte, à l’évidence vrai.

Par contre, si l’on peut véritablement reprocher quelque chose au président français, c’est d’avoir fait cette annonce en oubliant qu’il représente un pays qui dispose de l’arme nucléaire. Il envisage donc ainsi, même si ce n’est que théorique, une confrontation directe entre deux puissances nucléaires. C’est une très grosse erreur (16). Il s’en est rendu compte, puisqu’il a immédiatement « rétropédalé » (17).

Des décennies de domination sauvage nous attendent

C’est à la lumière de la future réaffirmation de l’OTAN qu’il faut aujourd’hui examiner toutes les décisions actuelles. Si l’on se donne cette peine, elles retrouvent du sens. Pour les USA, la guerre d’Ukraine est déjà du passé. L’essentiel maintenant est de tenir l’Europe à la gorge, et de serrer suffisamment fort et suffisamment longtemps pour que jamais leur domination ne soit remise en cause. Ceci nous promet, de la part de nos « amis américains », des décennies de domination « sauvage » comme nous n’en avons pas idée. Ce sera à la mesure de notre incapacité à nous rebeller. Si nous ne savons pas dire NON, c’est le destin de l’Argentine qui nous attend (18). On voit ce que lui ont coûté quelques mauvais choix dans son Histoire (le péronisme en particulier). Il en sera de même pour nous : le déclassement, la misère et la déchéance seront notre lot.  

François Martin

  • Expression passée dans le langage russe et ukrainien pour dire « parler et puis ne rien faire ».
  • https://www.bvoltaire.fr/la-sequence-samuel-paty-bien-vite-oubliee/ https://www.valeursactuelles.com/politique/macron-nest-pas-un-chef-detat
  • « Pour un retour de l’honneur de nos gouvernants » : 20 généraux appellent Macron à défendre le patriotisme – Valeurs actuelles
  • 60 milliards de USD.
  • 3 Milliards d’Euros récemment accordés à Zelensky par la France. Remarquons que l’entretien de l’Etat ukrainien en faillite, sans même parler de l’effort de guerre, coûte environ 6 milliards de USD par mois !
  • Lorsque la Russie aura conquis, après les élections russes et la fin du printemps, Kramatorsk et Odessa.
  •  On a coutume de dire que le véritable ennemi des USA est la Chine. Ce n’est pas vrai. En effet, les USA peuvent survivre à une affirmation régionale de la Chine. Ils ne le peuvent pas si l’Europe se rapproche durablement de la Russie. Le principal ennemi des USA est donc le couple Europe/Russie.
  • Cf « L’ami américain », Eric Branca
  • Essentiellement à travers la vente du gaz américain, à la place du gaz russe, entre 4 et 7 fois le prix payé aux USA. Cela permet d’inciter les industries européennes, et d’abord l’industrie allemande, à se délocaliser aux USA.
  • On peut ainsi prévoir, à moins d’une prise d’indépendance forte, qui ne peut venir que de la France, une décennie au moins de déréliction pour l’Europe, et en particulier pour la France. Nous n’avons aucune idée des souffrances qui nous attendent de la part de nos « amis américains ».
  • Et la Russie vient de répondre qu’elle considèrerait le tir de missiles Taurus sur le pont de Crimée comme une agression directe de l’Allemagne sur la Russie. Fin de l’affaire donc, probablement. Comme le dit Biden, « Poutine ne bluffe pas ».
  • Cela a déjà commencé, avec la réponse de Gabriel Attal à Marine Le Pen lors des questions récentes au gouvernement à l’Assemblée. On peut même se demander, lorsque l’on connaît le mépris qu’a Emmanuel Macron pour les questions internationales, et son appétence pour les affaires intérieures, si toute sa politique récente de durcissement de ses relations avec la Russie ne vise pas uniquement à mettre le RN dans l’embarras, pour institutionnaliser ensuite, au moment des européennes, un « procès » de l’opinion publique contre des « traîtres pro-Poutine »… Ce serait assez la méthode macronienne. On va assez vite le savoir.
  • Cf Eric Branca.
  •  Sont-ils encore des chefs ? Y a-t-il encore des Etats ?
  • La Rand Corporation l’a rappelé à plusieurs reprises. Ukraine, tout était écrit dans le plan de la Rand Corp. – Investig’action (investigaction.net)
  • https://youtube.com/shorts/OjTHZq84Nrg?si=l5HCXe-cpDIpD35z
  • https://www.bfmtv.com/politique/gouvernement/envoi-de-troupes-en-ukraine-le-retropedalage-du-gouvernement_VN-202402270698.html
  • Dans les années 1920, le niveau de vie des argentins était supérieur à celui des américains.

Voir aussi

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