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L’Allemagne de Merkel : pas si souveraine qu’on ne croit

Par François Stecher

Les Français ont au moins un point commun avec les Allemands : ils ont le plus grand mal à regarder par-dessus la barrière – à s’intéresser vraiment les uns aux autres. « On ne peut cependant pas être totalement étrangers, nous dit ici François Stecher, Français qui vit en Allemagne et la connaît à divers titres (y exerçant des fonctions qui lui imposent d’user d’un pseudonyme), lorsque, en bons voisins, on s’est étripé avec tant de fougue pendant des siècles, mêlant le sang, les tripes et la gloire dans la boue, la vigne et les blés ». Le départ de la Chancelière, après seize années d’un règne à la tonalité peu conservatrice, malgré l’étiquette de son parti dont les priorités ont été bafouées en bien des points (par exemple, et c’est notable, elle fut à plusieurs reprises plus proche de la politique états-unienne que son parti) fournit l’occasion de revenir sur la situation politique de la plus grande puissance économique d’Europe, puissance centrale dont la souveraineté vis-à-vis de ce qu’il est convenu d’appeler les hégémonies extérieures n’est pas aussi affirmée qu’on ne croit…

Le Français sait bien que l’Allemagne n’a qu’une chancelière, aussi inamovible que la reine d’Angleterre, une gentille petite bonne femme rondouillarde et souriante, fille de pasteur, pétrie de bonnes intentions, percluse de bons sentiments. Elle est bien sympathique, cette madame Merkel, et elle fait certainement du meilleur boulot que tous ces incapables de politiciens français. Comme il a néanmoins plus de sens politique que le deutscher Michel – qui en manque totalement – il aura au moins perçu l’importance de la décision de sortie du nucléaire prise par Angela après la catastrophe de Fukushima, dont il se sera réjoui – on va pouvoir leur vendre notre électricité nucléaire, aux fridolins – et il aura sans doute également ressenti une vague inquiétude lorsqu’il l’a entendue prononcer le « wir schaffen das » (« nous pourrons y arriver », ndlr), ouvrant ainsi toutes grandes les portes et les frontières de l’Allemagne aux vagues de migrants de la terrible année 2015. Il est beaucoup moins probable qu’il ait pris conscience que la gentille petite dame, sous couvert de pandémie, venait d’engager la principale puissance européenne sur un chemin que, dans sa courte mais déjà tumultueuse existence, l’État allemand a déjà emprunté deux fois, et pas forcément pour le meilleur : celui de la centralisation. Rappelons ici, sans entrer dans des détails qui mériteraient un plus ample développement, que le régime national-socialiste comme la République démocratique allemande (la RDA communiste) constituent les deux seules expériences allemandes de gouvernement centralisé.

Berlin décide, Paris suit

La réalité, c’est qu’il devrait être un peu plus inquiet, le bon citoyen français, et s’intéresser davantage à ce qui se passe outre-Rhin. Peut-être prendrait-il doucement conscience de cette réalité que son pays est commandé depuis Berlin – éventuellement via Bruxelles. En particulier, la pseudémie qui sert de prétexte, dans toute l’Union Européenne, aux restrictions des libertés individuelles les plus sévères depuis la seconde guerre mondiale ou l’effondrement des régimes totalitaires à l’Est, donne lieu, entre Berlin et Paris, à un spectacle dont Audiard et Guignol auraient fait leur miel. Une décision est prise à Berlin, une annonce est faite ; dans les 48 heures, au maximum, le gouvernement français la reprend – en général, pour le plus grand bonheur des observateurs attentifs. Deux exemples, parmi des centaines, où l’inimitable Jean Castex tient un rôle à sa mesure. En décembre 2020, l’Allemagne annonce que les Länder vont suspendre, par ordonnance, l’obligation faite aux élèves d’assister aux cours à l’école – le cadre législatif et réglementaire allemand le permet sans difficulté. Dans la foulée, notre Jean fait une déclaration ubuesque, dans laquelle il explique que l’école reste bien entendu obligatoire, mais que l’on peut ne pas y envoyer les enfants : personne n’a, encore aujourd’hui, réellement compris ce qu’il fallait faire. Plus récemment, la chancelière, violant le fédéralisme et l’autonomie de décision des Länder, impose un plan fédéral de lutte contre la pseudémie et y glisse un outil de déclenchement à la main de chancellerie, qu’elle appelle « Notbremse ». Curieusement, dans les jours qui suivent, à Paris, les laquais de Paris parlent d’un « frein d’urgence ». Bien malin qui peut expliquer ce qui se cache derrière cette expression traduite sans finesse, mais il reste le grand éclat de rires que soulèvent les ridicules pantins parisiens, tristes marionnettes de la chancelière. Voici donc posés deux éléments essentiels que tout Français soucieux de l’avenir de notre pays devrait avoir en tête : sous la férule de fer de la chancelière, et avec le soutien au moins passif d’une CDU subjuguée et déchirée, l’Allemagne a vu dériver son centre de gravité politique vers la gauche, ses éléments les plus conservateurs, AfD (droite radicale) et Werte Union (conservateurs favorables à une alliance des droites) repoussés aux marges de sa vie politique, et se mettre en place les bases législatives et réglementaires d’un régime parfaitement totalitaire, sous couvert de pandémie aujourd’hui, de crise climatique demain. Et c’est bien cet État qui commande Paris, quoi que tente de nous faire accroire l’Élysée. Alors que nous approchons de la fin du règne de Merkel (tout au moins en Allemagne car l’ex-chancelière pourrait bien se voir proposer un destin « européen »), il semble donc judicieux de s’intéresser aux élections au Bundestag du 26 septembre, à la suite desquelles la bête politique qui hante la chancellerie depuis bien trop longtemps quittera son antre – il faudra un jour raconter l’histoire véritable de cette femme de pouvoir, esprit tortueux et calculateur, digne élève en subversion de ses maîtres soviétiques, esprit scientifique également (elle s’est mariée une première fois avec un physicien, puis avec un chimiste) et pourtant capable de remplacer sa berline de fonction par un mini-bus Volkswagen afin de s’éloigner de son chauffeur et réduire ainsi le risque de contamination par coronafoirus.

Lire la suite dans le numéro 4 du Nouveau Conservateur – Eté 2021.

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