Pour Bruno Durieux, l’écologie est une science, aujourd’hui essentielle, qui a bien des liens avec l’esprit conservateur – et même, nous allons le voir, avec la souveraineté. Mais son instrumentalisation politique par l’écologisme, idéologie née dans les milieux progressistes des Etats-Unis, l’a complètement déportée à gauche, au point qu’elle occupe tout l’espace de l’anticapitalisme et prend la place du communisme évanoui.
C’est ce que montre et dénonce l’ancien ministre de la Santé (1990-1992) dans les gouvernements Rocard et Cresson – il fut aussi ministre du Commerce extérieur (1992-1993) dans le gouvernement Bérégovoy. Homme aux nombreuses facettes, ancien élève de l’École polytechnique, administrateur de l’INSEE, Inspecteur général des finances, Maire de Grignan (Drôme) et sculpteur de renom, Bruno Durieux a fondé dans sa ville le Festival de la Correspondance : c’était en 1996, année du tricentenaire de la mort de Mme de Sévigné, et il perdure depuis lors.
L’écologisme, comme idéologie, a pris son essor il y a cinquante ans, aux États Unis, sur fond de critique de la société de consommation, de guerre du Vietnam, de contestation de l’autorité et, de surcroît, en profitant du délitement des illusions communistes. Elle s’est répandue rapidement en Europe occidentale et notamment en France, où elle a été vivement combattue durant des décennies par le parti communiste, mais aussi par le parti socialiste.
Ces derniers défendaient alors l’emploi, la croissance et le pouvoir d’achat, préoccupation principale des milieux modestes qu’ils prétendaient représenter. Cependant, les écologistes ont gagné la bataille culturelle et occupent aujourd’hui la première place à gauche. Mais son instrumentalisation politique par les écologistes l’a complètement déportée à gauche. Ce renversement paradoxal se comprend : la dégradation de la planète est, selon l’idéologie écologiste, la conséquence du consumérisme entretenu par le capitalisme marchand ; c’est donc en luttant contre ce dernier qu’on sauvera la planète. Ainsi, l’écologie, science par excellence de la conservation de la nature, est aujourd’hui dévoyée en un simple gauchisme.
Autre paradoxe, l’écologisme combat l’abondance et prône la frugalité « heureuse » ; il défend le « pouvoir de vivre » plutôt que le pouvoir d’achat ; il donne la priorité à la « transition écologique » plutôt qu’à la croissance, y compris en temps de crise, à rebours des positions traditionnelles de la gauche.
Plutôt que l’espérance d’un mieux être matériel, l’écologisme réclame vertus et sacrifices pour sauver la planète des méfaits de son humain prédateur. Il tient son électorat par la peur millénariste, le catastrophisme prophétique, la culpabilisation cathartique. L’écologie comme science s’est depuis longtemps effacée au profit des croyances, des passions, des peurs. C’est l’ère du « précautionnisme rédempteur »…
…lisez la suite dans le 1er numéro !