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Napoléon : un bicentenaire maltraité

Il y a deux siècles, le 5 mai 1821, Napoléon à Sainte-Hélène, rendit à Dieu, selon le mot de Chateaubriand, « le plus puissant souffle de vie qui jamais anima l’argile humaine. » Pour cet hommage, nous reprenons la chronique donnée ce 5 mai par Philippe Delaroche sur les antennes de Radio Notre Dame.

Par Philippe Delaroche

Commémorer ou pas le bicentenaire de la mort de Napoléon : quelle sournoise arrière-pensée biaise la controverse ?

Est-il indiqué de commémorer le deux-centième anniversaire de la mort de Napoléon ? Il s’est éteint le 5 mai 1821 à Sainte-Hélène, « seul au milieu de lui-même » comme dit Léon Bloy dans L’âme de Napoléon. Je me propose de renverser la question.

Que la figure de Napoléon soit digne d’être commémorée, célébrée ou conspuée, à quoi bon dès lors qu’au débat s’est substitué un chantage orienté : ou l’on s’abstient ; ou bien l’on avance le jugement dernier, et l’on se réserve un ouvrage que les générations précédentes n’ont pas eu la présence d’esprit d’envisager : lui tailler un costard selon sa valeur militaire, selon son œuvre civile, ou selon ses crimes.

« C’est fini : Napoléon Ier à Sainte-Hélène », d’Oscar Rex (1857-1929), huile sur toile.

Mais sommes-nous seulement capables d’assez de clairvoyance, de discernement et même de grandeur pour commémorer la mort d’un homme que ses contemporains et la génération d’après tenaient pour un géant ? On peut bien le juger. Il n’en demeure pas moins « indéchiffrable », et néanmoins non-séparable de notre histoire.

Une arrière-pensée sous-tend la controverse, que voici…

On ne cherche pas tant à nous faire douter de Napoléon, comme si nous n’étions pas déjà avertis de ses fautes, fautes que, sans attendre nos impitoyables arrêts, le peuple français, qui en son temps eût à en souffrir, s’est permis de tolérer sans quoi il n’eût pas applaudi le vol de l’Aigle, de Golfe-Juan à Paris, « de clocher en clocher jusqu’aux tours de Notre Dame ».

On ne cherche pas tant à nous faire douter de la France, comme si nous n’étions pas déjà avertis des occasions où, par de coupables relâchements, les Français n’ont pas été à sa hauteur ; et comme s’il fallait chasser de nos mémoires ceux-là qui ont montré la voie du ressaisissement et de l’honneur.

On ne cherche pas tant à nous faire douter de nous-mêmes, comme si nous n’étions pas déjà avertis de notre désarroi, de notre inconstance, de nos accès de faiblesse.

« Vous n’avez ni souliers, ni habits, ni chemises, presque pas de pain, et nos magasins sont vides ; ceux de l’ennemi regorgent de tout. C’est à vous de les conquérir. Vous le voulez, vous le pouvez, partons ! » Napoléon BONAPARTE (1769-1821), à ses soldats, Toulon, 29 mars 1796

Qu’est-ce qui excite les agents du tri mémoriel, les gymnastes de l’anachronisme, les épurateurs, les vengeurs, les justiciers, les sermonneurs ?  

Ce qu’ils cherchent, ce n’est pas seulement à inoculer la honte, à faire détester l’histoire de la France, à faire vomir la France, à désigner les bons Français repentants, et par là-même un peu moins français, et les mauvais Français persistants, et par là-même un peu trop « franchouillards ».

Ce que recherchent les belles âmes au détour de leur inventaire, c’est à nous dégoûter de la continuer, la France.

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