Par Madame Christine Boutin
Un appel à la paix qui… reconnaît la fragilité de la paix en France
Nous avons demandé à Christine Boutin, ancienne ministre, Présidente d’honneur de La Voie du Peuple, de s’adresser régulièrement à nos lecteurs. Voici sa première « adresse ».
« Débattre pour se parler sans s’écharper » titrait le 24 septembre dernier La Croix afin de s’engager pour « un débat libre et respectueux » à l’aube de la campagne présidentielle de 2022. Plus de 100 personnalités fort diverses ont signé cet appel. Mais en vrai, que révèle cette proposition ? L’intention d’obtenir un débat serein ne peut être condamnée mais ne s’agit-il pas là encore d’un faux-nez pour éviter de parler de la vérité ? N’estil pas le révélateur d’un certain nombre de difficultés, dites ou tues, que vit notre Pays aujourd’hui ? N’est-il pas simplement la photographie d’une de nos peurs ? La démarche relève de la bonne volonté ou du principe de précaution, certes salutaires ; mais qu’un média ait besoin d’appeler à la paix avant une élection traduit l’état de violence dans lequel nous vivons aujourd’hui. Ce qui est sous-entendu est mis au grand jour : la crainte de violence est reconnue sans le dire. Cet appel reconnaît, de fait, la fragilité de la paix en France. Ce que l’on vise ici va des « fausses informations » aux réseaux sociaux qui ne doivent pas céder à la dénonciation, en passant par des recommandations relevant de préoccupations morales. Elles sont belles et fondatrices, mais dans un pays explosé, dans lequel l’individualisme est triomphant, où chacun définit sa morale à l’aune de ce qu’il pense, dans un pays où la mode donne libre cours à la culture Woke (dont l’objectif est de déconstruire même ce qu’elle déconstruit), comment voudrait-on que ces recommandations soient respectées ? J’aurais préféré que l’on ose dénoncer ces cultures, afin que chacun puisse comprendre l’origine des violences. Croire que l’on pourra atteindre un consensus est une chimère rassurante mais inférieure aux enjeux de cette présidentielle, qui sont la destruction ou la préservation de la civilisation européenne, et française, dans ce qu’elles ont d’universel. Ne soyons pas naïfs : n’ayons pas peur du débat, fût-il viril. Il est la source de la démocratie. Sortons des faux-semblants, des non-dits, des mensonges que nous avons subis pendant 40 ans ! Les Français n’en peuvent plus de toutes ces postures. Lucides, laissons le débat naître et se développer ; c’est sans doute la seule condition pour éviter l’explosion de la violence.
Madame Christine Boutin
