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La terrible affaire du château de Grignon

par Olivier de Laubarière

En 1582, Pomponne de Bellièvre, président à mortier au Parlement de Paris, achète la seigneurie de Grignon aux héritiers de Diane de Poitiers, puis la transmet à son fils Nicolas, lequel fait édifier à partir de 1636 le château et les bâtiments de communs, demeurés à ce jour intacts. Pur produit de l’architecture polychrome en faveur durant une centaine d’années à partir du dernier tiers du XVIe siècle, Grignon est un modèle d’équilibre entre le gris bleuté des ardoises couvrant les toitures à hauts pans, le rouge orangé de l’appareillage en brique et la blancheur de la pierre des chaînages harpés. Aussi curieux que cela puisse paraître, ce chef[1]d’œuvre de l’architecture Louis XIII érigé en marquisat en 1651 n’est pas classé MH mais seulement inscrit. Quant à son patrimoine mobilier, dont une partie intégra la demeure au début du XIXe siècle, il ne fait l’objet d’aucune protection, de même que sa riche bibliothèque.

Durant la Révolution, Grignon, alors propriété des Galard de Brassac, est déclaré Bien national et son mobilier est vendu en septembre 1794. Deux ans plus tard, Pierre-César Auguié, receveur général des finances, achète le domaine, y marie sa fille Aglaé, amie intime d’Hortense de Beauharnais, avec le maréchal Ney, puis le revend en 1803 au maréchal Bessières, duc d’Istrie. L’Empereur et une partie de la Cour seront reçus à Grignon par Bessières, avant que celui-ci ne soit tué à la bataille de Lützen. En 1826, la veuve du maréchal, très endettée, vend Grignon à Charles X qui le concède à bail l’année suivante pour une durée de quarante ans à une société par actions constituée dans le but de créer une école d’agronomie. L’Institution royale agronomique de Grignon est née et elle coulera des jours paisibles jusqu’en 2007 quand, après avoir changé plusieurs fois d’appellation, elle fait partie d’AgroParisTech et se trouve ainsi rattachée à l’Université de Paris-Saclay.

« Du passé, faisons table rase »

Germe alors le projet de transférer enseignants et étudiants sur le site de Saclay et de vendre le château et son domaine, propriétés du Ministère de l’Agriculture. Malgré une levée de boucliers des élèves et anciens élèves, appuyés par de nombreux élus locaux et associations, le processus de cession est enclenché qui donne lieu, à partir de 2015, à de multiples rebondissements, tant médiatiques que judiciaires. (1) En juin 2022, les Domaines (DIE et DNID en sigles administratifs) annoncent une vente de mobilier provenant du château de Grignon.

Cette vente doit se dérouler du 10 au 15 juin uniquement sur le site d’enchères en ligne des Domaines, donc sans exposition préalable, sur la base de photos de qualité déplorable et de descriptions des lots totalement erronées. Ainsi, les meubles sont systématiquement décrits comme étant “de style”, ce qui exclut l’hypothèse que certains puissent être “d’époque”. Les mises à prix, incohérentes, s’élèvent pour la plupart des lots à quelques dizaines d’euros.

Retrouvez la suite de cet article d’Olivier de Laubarière dans le numéro X du Nouveau Conservateur.

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