Éditorial de Guillaume de Thieulloy et Paul-Marie Coûteaux
Le Nouveau Conservateur a mis l’hiver à profit pour faire sa mue. Ce fut d’abord l’occasion de quelques changements dans notre organisation : la rédaction demeure sous la responsabilité de Paul-Marie Coûteaux tandis que l’administration et le développement passent entre les mains de Guillaume de Thieulloy, éditeur notamment des « 4 Vérités », des « Nouvelles de France » et du « Salon Beige » – c’est pourquoi le présent éditorial est écrit à quatre mains. Ces changements sont aussi l’occasion de réfléchir à l’expansion de notre revue, conçue comme un véritable livre collectif (les articles seront progressivement plus longs mais moins nombreux) et, muni de nouveaux instruments de communication (les titres de Guillaume de Thieulloy Editions s’ajoutant à notre site www.lenouveauconservateur.org ainsi qu’aux deux « Conversations mensuelles sur TVL », le plus souvent avec nos auteurs, et aux deux émissions mensuelles sur Radio Courtoisie), de créer un pôle conservateur multimédia, plus que jamais nécessaire à la pensée, ainsi qu’à ce que l’on pourrait appeler, face aux déchaînements du progressisme le plus sinistre, « l’urgence conservatrice ».
Pour « l’homme de la rue », la tradition conservatrice a souvent un aspect poussiéreux. Pourtant, il ne s’agit pas de conserver des vieilleries pour le plaisir de les entasser dans un grenier, mais plutôt de rappeler sans relâche les principes éternels sur lesquels se fonde la civilisation pour la transmettre, au moins aussi belle que nous l’avons reçue, à nos enfants. Nous pouvons bien jouer autant que nous le voudrons aux « éveillés » (« woke ») ou aux « annulateurs » (« cancel culture »), rien ni personne, pas même nous, ne pourra faire que nous n’ayons été formés, et élevés, par ce que nous avons reçu de nos pères. Bien que la tradition conservatrice française ait ses propres canons, nous reprendrions volontiers la réflexion de Benjamin Disraeli enjoignant à ses contemporains à « conserver ce qui vaut et réformer ce qu’il faut » – ce que Charles Maurras disait d’une autre façon : « la vraie tradition est critique ». De la même façon que, dans l’Eglise, toute réforme est d’abord un retour aux sources évangéliques, retour qui, bien sûr, n’ignore pas « le grand fleuve de la Tradition » sous peine de n’être qu’un pur archéologisme, l’esprit conservateur que nous entendons inspirer à nos contemporains vise à restaurer la grandeur nationale en revenant aux sources de la civilisation française. C’est en admirant nos rois, nos saints et nos héros que nous retrouverons les ressources intellectuelles et morales qui nous permettront de poursuivre l’œuvre qu’ils nous ont léguée.
On nous dira peut-être que cette vision est bien éloignée de l’action politique. Cependant, outre que ce n’est pas la mission d’une revue que « d’agir » – ou, plus exactement, le mode d’action d’une revue s’inscrit avant tout dans l’ordre des idées et des principes –, rien n’est plus urgent, politiquement, que la restauration d’un esprit national. Sans cet esprit, aucune victoire électorale n’est envisageable et même si, par impossible, cette victoire advenait, elle ne servirait qu’à peu de choses, ne portant au pouvoir que des tenants, plus conformistes qu’ils ne le croient eux-mêmes, de l’idéologie dominante – que l’on peut définir comme anti-française à la fois au sens où elle asservit la nation française à des intérêts étrangers et où elle répugne à illustrer la culture française, à la faire rayonner dans le monde et à s’en inspirer –, haine de soi dont M. Macron est un remarquable spécimen. Nous ne prétendons certes pas que tous les Français aient un réflexe conservateur ; mais il nous semble qu’il y a de sérieuses raisons de penser que la plupart des Français ne demandent qu’à en redécouvrir la sagesse, la saveur et les bienfaits. Au demeurant, il importe peu d’être majoritaire ou minoritaire, mais il importe beaucoup – tout spécialement dans le cadre d’une œuvre de « réforme intellectuelle et morale » comme celle à laquelle nous nous attelons depuis plus de deux ans – de bâtir sur les fondations solides du Beau, du Bien et du Vrai – et du Beau, du Bien et du Vrai dans leurs colorations spécifiquement françaises.
Il nous semble ainsi que notre mission est double : montrer que les quelques principes généraux d’action politique conservatrice correspondent au sens commun de nos concitoyens ; bâtir, avec les nombreux amis de notre revue qui ont servi la France avec talent dans tant de champs différents, un véritable programme de restauration nationale. Cette ligne dicte notre attitude à l’égard des partis politiques et des autres forces engagées dans le combat pour la France. Bien que la plupart de ces forces (nous en excepterons naturellement nos amis de Via, du Mouvement Conservateur et du CNIP membre de Reconquête!) n’adhèrent pas tous aux principes du conservatisme français, nous travaillons volontiers, ponctuellement ou régulièrement, avec elles ou avec certains de leurs membres pour bâtir patiemment, pan après pan, la coalition et le programme qui non seulement permettront la victoire électorale française mettant enfin un terme aux « cinquante calamiteuses », mais surtout édifieront la restauration française que nous instruisons numéro après numéro.
Merci, chers lecteurs, pour votre fidélité – et n’hésitez pas à proposer à vos proches de nous rejoindre en nombre toujours plus grand.
Paul-Marie Coûteaux
Guillaume de Thieulloy