Le Travail a changé, sous la direction de Gilles Gateau, Editions du Cherche-Midi.
Recension par Guillaume de Thieulloy

Nous avions publié un dossier sur le travail dans notre n° 13 (en partenariat et en prolongement d’un colloque sur le sujet organisé par Via et l’Alliance des conservateurs).
Nous avons eu le plaisir de constater qu’un certain de questions abordées dans ce dossier et ce colloque étaient traitées – sous un angle différent mais largement complémentaire – par ce livre dirigé par Gilles Gateau, directeur général de l’Agence pour l’emploi des cadres (APEC).
L’APEC a, en effet, mené un remarquable travail de prospective sur la façon dont nous travaillerons dans la décennie 2030, forte de ses relations avec les organisations syndicales et patronales (dont nombre de représentants siègent à son conseil d’administration).
Ce travail vient de donner lieu à l’édition d’un ouvrage de synthèse, relativement bref (150 pages), mais particulièrement dense et instructif.
On y relève en particulier que le travail tient un rôle de plus en plus réduit dans la vie des cadres (la « clientèle » qui intéresse l’APEC au premier chef, mais cela vaut au-delà du cas spécifique des cadres puisque ces derniers influent évidemment sur l’entreprise qu’ils encadrent), mais que, malgré cela, ces derniers demeurent profondément attachés à leur entreprise – ce qui nuance quelque peu les jugements à l’emporte-pièce que l’on entend beaucoup, ces derniers temps, sur le « big quit », cette vague de démission qui aurait touché les entreprises du monde développé.
En revanche, il est certain que le travail a perdu son unité de lieu et de temps – comme l’on disait dans le théâtre classique : les salariés n’ont plus nécessairement un bureau fixe et attitré et peuvent souvent travailler pour leur société le soir ou durant leurs congés, tandis qu’à l’inverse, ils s’absentent plus facilement en journée.
Naturellement, une partie significative du livre est consacrée au numérique, dont nous n’avons pas fini d’observer à quel point il révolutionne nos usages et nos relations – y compris dans l’entreprise.
De même est évoqué le développement de la robotique qui pourrait dispenser les salariés des tâches les plus ingrates et les plus pénibles.
Reste une question majeure : devons-nous nous attendre à une épidémie de chômage quand les travaux à faible valeur ajoutée seront tous attribués à des machines ? L’ouvrage penche plutôt vers l’optimisme, en soulignant que cette révolution technologique sera source de nouvelles opportunités. Mais il insiste sur l’importance du développement des compétences. Or, nos modernes oligarques ont méticuleusement détruit l’Éducation nationale qui est devenue à peu près incapable de transmettre quelque savoir que ce soit – et ils méprisent depuis longtemps le travail manuel et l’apprentissage ! Ce qui limite singulièrement nos chances d’affronter avec succès les révolutions à venir…
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