C’est à dessein que nous plaçons en tête de nos rubriques la politique étrangère – pour la même raison, nous l’intitulons « Politique étrangère d’abord ». Il est déplorable que, étrangères, les affaires qui secouent le monde le soient autant aux informateurs patentés comme aux préoccupations des citoyens, tant elles surplombent et déterminent les termes et les choix de l’ensemble de la politique intérieure.
Quelques exemples : si la France protège si mal ses frontières, en matière d’immigration comme en matière commerciale, c’est qu’elle s’est elle-même ficelée dans un épais entrelacs de traités, accords et tribunaux européens qui l’en empêchent, et que nos gouvernants comme les partis qui leur servent d’opposition sont, malgré les discours d’usage, trop faibles pour comprendre et dénouer. De même, si la France a renoncé à développer son internet propre, ce que l’essai réussi du Minitel aurait permis dans les années 80, si elle a peu à peu abandonné ses programmes de recherche spatiale dans lesquels elle excellait jadis, c’est que, dans les deux cas, ses élites, ou plutôt ses oligarchies, se sont convaincues qu’il n’était pas possible de poursuivre des projets industriels de grande ampleur sans la coopération de l’Allemagne, cela au nom du sacro-saint mais illusoire couple franco-allemand qui, des décennies durant, mit pour ainsi dire notre politique en pilotage automatique – dans les deux cas, l’Allemagne ne dit jamais non mais fit traîner si longtemps les études et les négociations que lesdits programmes tombèrent à l’eau les uns après les autres…
par Jacques Bainville