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Une école ambitieuse, meilleur antidote au séparatisme

Par Anne Coffinier

Le 14 octobre 2020, l’Institut de France accueillait des historiens, des professeurs, et des hommes politiques pour réfléchir à ce que l’Ecole pouvait faire pour lutter contre ce que le président nommait « séparatisme islamiste ». Notre amie Anne Coffinier, dont on connaît l’inlassable combat en faveur de le liberté de l’enseignement, était invitée à le clore et en rend compte ici. Ce colloque, organisé par la Fondation Kairos intervenait 12 jours après le discours des Mureaux dans lequel M. Macron associait étrangement l’interdiction de l’instruction en famille à une déclaration de guerre au séparatisme islamiste, et deux jours avant l’assassinat de Samuel Paty…

La matinée fut ouverte par trois intervenants : l’ancien inspecteur général de l’Education Nationale Jean-Pierre Obin, la philosophe Chantal Delsol, et Mathieu Bock-Côté, sociologue. Jean-Pierre Obin a décrit l’islamisation de l’école publique française dont il fut le premier à évaluer la gravité dans un rapport en 2004. Depuis 2015, estime-t-il cependant, « on ne met plus la poussière sous le tapis » : les atteintes multiples à la laïcité dans les écoles publiques sont enfin recensées officiellement. Selon lui, il faut reconnaître que l’islamisme est notre adversaire et que l’on doit sa pénétration dans l’Ecole aux décideurs, de droite comme de gauche. Chantal Delsol montra comment « l’école avait renoncé à imposer la culture française aux élèves issus de la diversité ». « Ce système égalitariste (qui cherche l’égalité des élèves par un nivellement par le bas) pourrait être efficace à condition de supprimer la famille » comme Staline avait essayé de le faire. « Il n’y a que les familles qui puissent lutter contre cette situation, mais les conséquences en sont catastrophiques. » ; mais « Il est probable que nous avons été victimes d’une théorie dominatrice, celle de Bourdieu dont le but n’était pas de promouvoir l’égalité devant la réussite mais bien d’anéantir l’idée même d’une élite. ». Avec le délitement de l’école, il ne reste plus que la transmission assurée par les familles : « Les familles cultivées vont s’appliquer à combler le vide culturel de l’école. ». Nous deviendrons une société purement aristocratique, partagée entre 2 ou 3 % de gens supérieurement cultivés à côté d’un immense peuple analphabète. La période républicaine de l’égalité des chances, grâce à l’exigence et à l’excellence, n’a peut-être été qu’une parenthèse, vite refermée. Après avoir redit son « attachement aux grandes institutions communes », Mathieu Bock-Côté finit par un appel : « vu les circonstances historiques particulières qui sont les nôtres », « dans une époque troublée comme la nôtre, qui en vient à douter de la légitimité de cette civilisation qui nous a pourtant faits », il devient nécessaire de « défendre ces oasis de culture » que sont l’école à la maison ou les écoles entièrement libres, et qui sont finalement « des institutions où la tradition occidentale est préservée jusqu’à ce qu’elle puisse se redéployer au cœur même de nos institutions communes ». « Elles conservent ce que les institutions communes ne veulent plus conserver. »

Un socle de connaissance sur lequel « faire nation »

La deuxième partie de la matinée réunit Franck Ferrand, historien et journaliste, Jean-Robert Pitte, géographe et secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences morales et politiques, et Souâd Ayada, présidente du Conseil supérieur des programmes de l’Education nationale. Les intervenants ont pu rappeler l’importance d’un « roman national qui unifie la nation, quitte à le nuancer ensuite » (Franck Ferrand) et d’un enseignement charnel de la géographie. Franck Ferrand et Jean-Robert Pitte sont d’accord pour souligner la nécessité de transmettre à l’école un socle commun de connaissances, sur lequel on puisse « faire nation ». Souâd Ayada a de son côté mis en garde contre les prétentions de l’enseignement religieux et le mauvais enseignement de la langue arabe et de ce qu’elle signifie dans le débat public. Le chancelier Xavier Darcos conclut la matinée en rappelant la satisfaction de l’Institut de France d’avoir accueilli la Fondation Kairos, car cette grande institution fondée Deux tables rondes dans l’après-midi : la première réunissait Cécile Ladjali, enseignante et titulaire du prix Femina, Murielle Magellan, dramaturge, et Yasmine Chelha, étudiante à Sciences Po, originaire de Bobigny, formée durant sept ans à l’internat d’excellence de Sourdun – une exigence illustrée par la lecture des classiques qui permettent d’avoir une langue et une culture communes, qui s’est dite reconnaissante de l’exigence de cet internat qui lui a changé son destin, chance que ses amis restés à l’école publique de Bobigny n’ont pas eue. Si ces initiatives concrètes montrent leur efficacité dans la lutte contre les atteintes islamistes, en revanche les solutions officiellement à l’étude semblent étonnamment décalées. Selon Eric Diard, M. Macron, malgré l’avis opposé du ministre Jean-Michel Blanquer, refuse de légiférer sur la question pourtant brûlante des mères voilées accompagnant les sorties scolaires. Pourtant, pour contrer le séparatisme islamiste, aucune mesure d’ampleur n’a été annoncée relativement à l’école publique, qui accueille 98 % des jeunes musulmans, lesquels en sont, selon Jean-Pierre Obin, les premières victimes. En revanche, cette loi est la troisième en trois ans à porter sur l’école libre hors contrat et l’école à la maison, qui sont ainsi stigmatisées. Faut-il comprendre que, pour lutter contre la pénétration de l’islamisme, il faut interdire l’alternative qu’est l’instruction à domicile ou compliquer encore le développement des écoles hors contrat ? Le lien logique entre le problème et la solution est difficile à trouver, et tant le député Diard que l’élue proche de Manuel Valls, Najwa El Haïté, le reconnaissent : l’interdiction de l’école à la maison et les restrictions contre les écoles hors contrat se traduiront par l’essor mécanique des formes de scolarisation en 1795 a pour idéal de « cimenter la République », ce qui passe par l’éducation. Deux tables rondes dans l’après-midi : la première réunissait Cécile Ladjali, enseignante et titulaire du prix Femina, Murielle Magellan, dramaturge, et Yasmine Chelha, étudiante à Sciences Po, originaire de Bobigny, formée durant sept ans à l’internat d’excellence de Sourdun – une exigence illustrée par la lecture des classiques qui permettent d’avoir une langue et une culture communes, qui s’est dite reconnaissante de l’exigence de cet internat qui lui a changé son destin, chance que ses amis restés à l’école publique de Bobigny n’ont pas eue. Si ces initiatives concrètes montrent leur efficacité dans la lutte contre les atteintes islamistes, en revanche les solutions officiellement à l’étude semblent étonnamment décalées. Selon Eric Diard, M. Macron, malgré l’avis opposé du ministre Jean-Michel Blanquer, refuse de légiférer sur la question pourtant brûlante des mères voilées accompagnant les sorties scolaires. Pourtant, pour contrer le séparatisme islamiste, aucune mesure d’ampleur n’a été annoncée relativement à l’école publique, qui accueille 98 % des jeunes musulmans, lesquels en sont, selon Jean-Pierre Obin, les premières victimes. En revanche, cette loi est la troisième en trois ans à porter sur l’école libre hors contrat et l’école à la maison, qui sont ainsi stigmatisées. Faut-il comprendre que, pour lutter contre la pénétration de l’islamisme, il faut interdire l’alternative qu’est l’instruction à domicile ou compliquer encore le développement des écoles hors contrat ? Le lien logique entre le problème et la solution est difficile à trouver, et tant le député Diard que l’élue proche de Manuel Valls, Najwa El Haïté, le reconnaissent : l’interdiction de l’école à la maison et les restrictions contre les écoles hors contrat se traduiront par l’essor mécanique des formes de scolarisation clandestine, donc hors de tout contrôle cette fois : le contraire du but recherché. Najwa El Haïté livre finalement les clés de compréhension de cette curieuse idée. A l’origine de ces mesures restrictives, il y a la perte de contrôle des jeunes toujours plus nombreux qui s’évaporent de l’Education nationale sans qu’on sache ce qu’ils deviennent. Mais là où la solution relève d’un amalgame malheureux, c’est qu’en interdisant ou en stigmatisant les formes encadrées et contrôlées de libertés scolaires, on ne donnera plus aucun outil à la puissance publique.

Nous avons besoin d’une alternative à l’école publique

Au lieu de ces solutions aussi injustes que contreproductives, j’ai rappelé en conclusion le « problème d’application de la loi : à savoir inspecter les lieux connus pour être des écoles clandestines », plus grave encore qu’un problème de loi inadaptée. J’ai proposé des solutions concrètes : – instaurer des référents justice dans les écoles hors contrat pour garantir à ces dernières le moyen d’être certaines de ne pas recruter des fichés S ; – inspecter les lieux qu’on soupçonne d’accueillir des écoles clandestines, et qui sont bien souvent connus des renseignements territoriaux ; – impliquer davantage le ministère de l’Intérieur dans les contrôles des écoles ou des familles potentiellement radicalisées. Je suis convaincue que la France et la République ont besoin de diversité éducative. Comme en 1984, nous voulons garder cette liberté de choix. Aujourd’hui tout le monde est concerné par l’école à la maison parce que beaucoup savent qu’ils peuvent en avoir besoin un jour. Il est troublant de devoir se justifier pour utiliser une liberté fondamentale, malsain d’avoir à demander, pour enseigner, un certificat médical qui va suivre son enfant toute sa vie et le stigmatiser, et c’est aussi contreproductif alors qu’on ne sauvera l’école que si on crée un lien fort entre elle et les familles. Soyons moins crispés sur l’institution scolaire. Il y a mille manières d’être un citoyen actif de la République. Et la première des choses, c’est de recevoir une instruction solide, une maîtrise de la langue efficace, et de n’être pas harcelé. La première des injustices, c’est l’inégalité d’une école publique à l’autre en fonction de la carte scolaire. Nous avons tous besoin d’une alternative à l’école publique pour la stimuler. La liberté scolaire est vraiment au cœur de la responsabilisation des parents sans laquelle on ne fera rien.

Anne Coffinier

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