Par Laurence Trochu
L e Pacte vert, présenté par Ursula von Der Leyen peu de temps après sa prise de fonction en décembre 2019, est un exemple caractéristique d’une bonne intention qui pave, avec tant d’autres, le chemin de l’enfer. Il est même la pierre angulaire de toute l’action menée par la Commission européenne, visant à réduire de 55 % l’empreinte carbone de l’UE d’ici à 2030 par rapport à 1990 (objectif «Fit for 55») et à atteindre la «neutralité carbone» de l’UE en 2050. Il se décline d’ailleurs en plusieurs blocs, parmi lesquels Restauration de la nature, De la ferme à la table, RePowerEU, Zéro émission nette. Quand la Commission présente des textes de cette nature, en principe, elle en analyse les conséquences dans une étude d’impact. Rien de tel ici, seulement les chimères issues directement d’un lobbying actif et efficace d’acteurs non gouvernementaux largement acquis à la cause écologiste, dont on a découvert récemment qu’ils avaient bénéficié de subventions de la même Commission européenne pour influencer parlementaires et gouvernements.
En attendant, d’autres études sont publiées, dont celle du Département Américain de l’Agriculture (USDA), qui s’inquiète des retombées induites de la stratégie De la ferme à la table non seulement sur l’agriculture européenne, mais aussi sur les équilibres alimentaires mondiaux. Toutes confirment, à des degrés divers, que la stratégie F2F sera une tragédie. L’étude de Kiel par exemple prévoit une baisse de production globale de 16 %, dont – 21 % en céréales, une balance commerciale alimentaire déficitaire et un coût annuel estimé de 70 milliards d’euros, soit 157 € par Européen et par an! Malgré cela, le 19 octobre 2021, le Parlement vote encore très majoritairement pour: 470 pour, 170 contre et 76 abstentions. Cinq ans après le lancement du Pacte vert, les résultats montrent que, malgré tous les efforts économiques dangereux supportés par les Européens, les objectifs sont tout simplement inatteignables: «En 2023, les émissions mondiales ont augmenté de 54 %, ce qui représente 39,3 milliards de tonnes. Celles de la Chine ont triplé, tout comme celles de l’Inde. La réduction de 23 % en Europe et de 9 % aux États-Unis ne représente donc qu’une goutte d’eau», rappelle l’expert des questions énergétiques Vaclav Smil (Le Figaro, 9 avril 2025). Avec les Conservateurs et Réformistes Européens, nous avons auditionné le Pr Lomborg, statisticien danois, qui nous a éclairés sur les coûts et les résultats des politiques du Pacte Vert. S’appuyant sur le constat évident de l’augmentation du prix de l’électricité en Europe, plus 75 % depuis l’année 2000, il a mis en lumière l’incohérence de ces politiques dites écologiques et souligné que les pays qui n’ont pas recours au solaire ou à l’éolien paient moins cher leur électricité pour les ménages et l’industrie, car le coût de production de leur électricité est stable là où un approvisionnement qui s’appuie sur le vent et le soleil est tributaire des aléas qui leur sont inhérents.
Mais l’Union européenne a systématiquement sous-estimé le coût de cette politique verte. C’est pourtant chaque année 10,5 % du PIB de l’UE d’ici 2050, soit 3 300 milliards. Avec tous les efforts violemment imposés aux pays de l’UE, la part des combustibles fossiles n’est passée que de 87 % à 82 % en 50 ans. Donc affirmer la possibilité d’une neutralité carbone en 2050 est un mensonge; il faudrait quatre siècles pour y parvenir! Par ailleurs, ces politiques ont un bénéfice de 4 500 milliards mais elles coûtent 27 000 milliards de dollars par an, ce qui correspond à un quart du PIB mondial!
Derrière ces chiffres si démesurés qu’ils ne parlent plus à personne, il y a des réalités concrètes au quotidien: interdiction de circuler dans les centres-villes, taxations délirantes à venir pour les propriétaires dont les maisons seraient trop anciennes et donc trop gourmandes énergétiquement, interdiction potentielle des feux de cheminées, coût de l’énergie, obligation pour les entrepreneurs de rendre compte de leur politique environnementale, mais aussi sociale (inclusion, lutte contre les discriminations, parité…). L’écologie mérite mieux que des considérations idéologiques qui font de l’homme l’ennemi de la nature au point de justifier son élimination programmée.
Cette réalité, d’une part, de l’inefficacité du Green Deal et, d’autre part, de son coût exorbitant s’impose désormais à tous. «Tout ça pour ça » pourrait résumer le désastreux entêtement de l’Union européenne, avec comme conséquence la destruction de nos économies et, pour les entreprises, un terrible frein à l’investissement et à l’innovation. Mais le réalisme des groupes ECR et des Patriotes pour l’Europe, accompagnés parfois du PPE, est un signal d’espoir pour défaire les pans les plus violents du Green Deal: nous venons de faire voter le report de trois ans de l’interdiction de vente de nouvelles voitures à essence et diesel dans l’UE d’ici 2025. Nous pouvons nous réjouir de voir que le programme de travail de la Commission pour l’année 2025 ressemble fort à un détricotage systématique de ce qui constituait jusqu’alors l’âme, le corps et l’esprit des années 2019-2024. Ainsi, chaque pavé retiré de cet édifice du Pacte vert est une victoire. D’autres suivront!