A lire – Je ne regrette rien. L’heure est venue de dire pourquoi

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Je ne regrette rien par Eric Ciotti aux éditions Fayard.

Recension de Francis Jubert

Dans Je ne regrette rien, Éric Ciotti livre un plaidoyer vibrant pour l’union des droites, un projet qu’il présente comme une réponse audacieuse à l’impasse politique française. Publié chez Fayard, cet ouvrage s’inscrit dans un contexte de fracture idéologique et de recomposition politique, où la droite française, divisée depuis des décennies, cherche à reconquérir le pouvoir. À travers une narration à la fois personnelle et programmatique, Éric Ciotti retrace son parcours, sa décision controversée de briser le « cordon sanitaire » avec le Rassemblement National (RN), et sa vision d’une France « libérée », fidèle à ses racines.

Le livre s’ouvre sur une note triomphale: l’élan populaire qui a suivi l’annonce d’une alliance entre LR et le RN de Marine Le Pen et Jordan Bardella. « Nous avons besoin d’une alliance, en restant nous-mêmes, avec le Rassemblement national et avec ses candidats » annonçait Éric Ciotti le 11 juin 2024. L’ancien président de LR décrit cet événement comme une rupture historique, mettant fin à quarante ans de « piège mitterrandien » – une stratégie attribuée à François Mitterrand visant à marginaliser la droite en diabolisant toute coopération avec l’extrême droite. Cette « brèche » dans le « mur du politiquement correct » est le fil conducteur de l’ouvrage, illustrée par des témoignages d’électeurs désabusés qui retrouvent espoir grâce à cette union. Éric Ciotti y voit la preuve d’une aspiration populaire à une droite décomplexée, débarrassée des injonctions morales de la gauche.

Une brèche dans le mur du politiquement correct

Le plan du livre, structuré en cinq parties, suit une progression chronologique et thématique. La première partie, « Choisir la droite », relate les « heures décisives » de l’annonce de l’alliance et les réactions qu’elle a suscitées, de l’hystérie des cadres LR à l’indignation de la gauche. Éric Ciotti dénonce l’aveuglement de son parti, prisonnier de petits arrangements et d’une stratégie perdante. La deuxième partie, « Le piège », analyse les mécanismes qui ont maintenu la droite dans une posture défensive, notamment l’influence d’une élite intellectuelle et médiatique. Les sections suivantes, « Les années Chirac », « L’espérance déçue » et « Anatomie d’une chute », retracent les échecs successifs de la droite depuis 2007, des compromissions de l’UMP à l’affaire Fillon, en passant par les divisions internes.

Une vision enracinée et combative

Éric Ciotti se présente comme un « fils de Nice », ancré dans les réalités du terrain, loin des abstractions parisiennes. Son discours est empreint d’un patriotisme charnel, nourri par les drames – comme l’attentat du 14 juillet 2016 à Nice – et les défis du quotidien, du désespoir des retraités à l’effort des jeunes. Cette proximité avec le peuple structure son appel à une « révolution du bon sens », qui repose sur des valeurs traditionnelles: autorité, liberté économique, identité judéo-chrétienne et européenne. Il critique un État bureaucratique et des normes étouffantes, plaidant pour une France qui « ose » et qui « crée ».

L’ouvrage n’est pas exempt de contradictions. Si le président de l’Union des droites pour la république (UDR) revendique une rupture radicale, il reste attaché à l’héritage gaulliste, qu’il évoque sans toujours en préciser les contours. Son alliance avec le RN, bien que présentée comme pragmatique, suscite des interrogations sur la compatibilité des cultures politiques des deux formations. De surcroît, son analyse des échecs de la droite, bien que très pertinente, manque parfois de recul sur le rôle qui a été le sien dans les luttes internes de LR.

Dans ce livre, Éric Ciotti articule un diagnostic sans concession des failles de la droite et une vision offensive pour son avenir. L’ouvrage s’adresse autant aux militants qu’aux électeurs déçus, cherchant à fédérer autour d’un projet commun. Toutefois, il élude certaines questions pratiques: pour autant que cela soit possible, comment concilier les divergences programmatiques des différentes composantes de la droite avec le RN? Quelles concessions une telle alliance implique-t-elle?

Je ne regrette rien est un manifeste politique autant qu’un témoignage personnel. Éric Ciotti y défend une droite qui assume ses valeurs, n’accepte plus de se laisser stigmatiser et refuse d’être marginalisée. S’il convainc par sa sincérité et son énergie, son projet reste à concrétiser face aux résistances internes et externes. À l’approche de 2027, cet ouvrage pose les jalons d’un débat crucial pour l’avenir de la droite française que Le Nouveau Conservateur continuera d’explorer.

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